JARDINS D’ALBERTAS Imposants et solennels, Hercule, Samson, David et le Gladiateur d’Éphèse veillent sur les terrasses d’Albertas. Conçus en 1751 selon des plans heureusement conservés, ce qui autorise leur restauration à l’identique, ces jardins au fort dénivelé marient avec grâce la mode italienne et le vocabulaire des jardins à la française. Installés dans un vallon ombragé où l’eau abondante a permis la création d’un canal, de bassins et de la fontaine aux 17 jets, ils ont aujourd’hui retrouvé leur magnificence originelle. Ces jardins, créés pour mettre en valeur une bastide qui ne fut pas construite, se suffisent à eux-mêmes. La succession des trois terrasses – les bosquets, les parterres et le potager – ménage des surprises visuelles, un véritable plaisir sensuel et esthétique : l’eau, les arbres et les sculptures y forment un décor harmonieux profondément xviiie siècle, témoin de l’aisance et du goût des grandes familles aixoises.
LA GARENNE LEMOT
Il ne manque, pour parfaire le tableau pastoral et arcadien de La Garenne Lemot, que quelques bergères et une apparition fugitive du dieu Pan poursuivant une nymphe ! La création de cet enchanteur jardin italianisant, dans les années 1805, revient au sculpteur Frédéric Lemot. Séduit par le site, un vallon escarpé parsemé de quelques chaos rocheux et dominé par les ruines romantiques d’un château médiéval, il décide d’en faire un paysage idyllique, de reproduire une image rêvée de la campagne antique. Statues du sénateur ou d’Esculape, temple de Vesta, tombeau autrefois gravé de l’inscription Et in Arcadia ego ou encore temple de l’Amitié se détachant sur l’horizon rythmé par quelques pins parasols participent de cette illusion du bonheur terrestre. Par ce décor pittoresque, réparti sur un domaine de 13 hectares, Lemot a fait œuvre multiple : il a initié une mode durable, créé un modèle idéal pour les peintres paysagistes et conçu une réalisation majeure pour l’histoire des jardins.
JARDINS DE VALMER
Si les vignobles alentour sont bien ceux de Vouvray, et non ceux de Chianti, les terrasses de Valmer évoquent pourtant bien l’Italie. Créées au xvie siècle, lorsque la mode des jardins venait encore de Toscane, elles épousent avec douceur le dénivelé du coteau. Remarquablement restaurées d’après des relevés anciens, subtilement fleuries, ces terrasses bordées de murets ajourés sont reliées par d’élégants escaliers. Fontaines florentines et statue de Léda y font office de parure, italienne toujours. Tout en bas, le potager d’un hectare paraît résister à cet engouement géographique. Conservatoire d’espèces rares, il aime au contraire faire courir sa propriétaire aux quatre coins du monde, à la recherche de graines de plantes potagères disparues qui viendront s’ajouter aux 900 variétés cultivées ici. Au-delà, comme un trait de ponctuation final, le Grand canal interrompt la perspective de ces jardins étagés, témoins de l’influence italienne aux abords de la Loire, à la Renaissance.
SERRE DE LA MADONE
La Serre de la Madone est de ces jardins rares, œuvre tout à la fois profondément personnelle et d’un intérêt universel par sa richesse botanique. Aménagé par le secret et illustre major Johnston, génial créateur des jardins de Hidcote Manor, le domaine constitué de plusieurs parcelles réunies entre 1924 et 1930 est sa seconde grande œuvre, fruit d’une vie de passion. À l’inverse de son jardin du Gloucestershire, plat et composé de chambres, les anciennes restanques agricoles mentonnaises lui permettent de créer ici une structure en terrasses, à l’italienne. Elles composent un ensemble de scènes (jardin mauresque, belvédère des glycines, jardin à la française, rocaille, jardin d’eau) aussi charmantes que riches en espèces botaniques, plantes exotiques « chassées » dans le monde entier par Johnston. Une richesse telle que le Conservatoire du littoral, acquéreur du jardin en 1999, a voulu en faire un Centre international des plantes rares acclimatées.
saint-Gabriel-brécy JARDIN DU CHÂTEAU DE BRÉCY « Des atours de princesse italienne jetés sur les épaules d’une petite paysanne normande » ! Ainsi Jacques de Lacretelle décrit ses jardins, après les avoir sauvés de l’abandon en 1958. À l’arrière du château blotti dans un vallon, les terrasses créées durant la seconde moitié du xviie siècle suivent la pente montante de la colline. À l’inverse des traditionnels jardins à l’italienne, le regard ici se lève, jusqu’à la ligne d’horizon. Les quatre niveaux, qui s’élargissent pour parfaire la perspective, sont réunis par une allée centrale et une suite d’esca
-liers. Unifiés aussi par le raffinement de leur décor contrasté, entre rigueur des topiaires et richesse des ornements sculptés : pots à feu, fontaines-artichauts, lions bicéphales au long de l’allée, vases sur les murs. Dans l’axe toujours, l’imposante grille en ferronnerie dévoile la perspective qui se poursuit à travers la campagne. Ce jardin où l’on perçoit l’influence de la Renaissance, le goût de l’ornement baroque et des traits annonciateurs du jardin à la française apparaît parfait : justement proportionné, paré sans excès, symétrique sans ennui. Pourtant, de ce chef-d’œuvre longtemps attribué à François Mansart, on ignore encore le nom du créateur.
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